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Romans de romance dans un seul endroit

Chapitre 44


Mariolle venait d’arriver chez elle. Il l’attendait, car elle n’était pas rentrée, bien qu’elle lui eût donné rendez-vous par une dépêche bleue, le matin.

Dans ce salon, où il aimait tant se sentir, où tout lui plaisait, il éprouvait cependant chaque fois qu’il s’y trouvait seul, une oppression du cœur, un peu d’essoufflement, d’énervement, qui l’empêchaient d’y rester assis tant qu’elle n’avait point paru. Il marchait, dans une attente heureuse, avec la crainte que quelque obstacle imprévu ne l’empêchât de revenir et ne remît au lendemain leur rencontre.

Quand il entendit s’arrêter une voiture devant la porte de la rue, il eut un tressaillement d’espoir, et lorsque sonna le timbre de l’appartement, il ne douta plus.

Elle entra, son chapeau sur la tête, ce qu’elle ne faisait jamais, avec un air pressé et content.

– J’ai une nouvelle pour vous, dit-elle.

– Laquelle donc, madame ?

Elle se mit à rire en le regardant.

– Eh bien ! je vais passer quelque temps à la campagne.

Un chagrin le saisit, subit et fort, que son visage refléta.

– Oh ! Et vous m’annoncez cela avec une figure satisfaite !

– Oui. Asseyez-vous, je vais vous conter tout. Vous savez ou vous ne savez pas, que M. Valsaci, le frère de ma pauvre mère, l’ingénieur en chef des ponts, a une propriété à Avranches où il passe une partie de sa vie avec sa femme et ses enfants, car il exerce là-bas sa profession. Or nous allons les voir tous les étés. Cette année, je ne voulais pas ; mais il s’est fâché et il a fait à papa une scène pénible. À ce propos, je vous confierai que papa est jaloux de vous, et m’en fait aussi, des scènes, en prétendant que je me compromets. Il faudra que vous veniez moins souvent. Mais ne vous troublez point, j’arrangerai les choses. Donc papa m’a réprimandée et m’a fait promettre d’aller passer dix jours, peut-être douze, à Avranches. Nous partons mardi matin. Qu’en dites-vous ?

– Je dis que vous me navrez.

– C’est tout ?

– Que voulez-vous ? je ne peux vous en empêcher !

– Vous ne voyez rien à faire ?

– Mais… mais non… je ne sais pas moi ! Et vous ?

– Moi j’ai une idée, que voici : Avranches est tout près du Mont Saint-Michel. Connaissez-vous le Mont Saint-Michel ?

– Non, madame.

– Eh bien ! vous aurez vendredi prochain, l’inspiration d’aller voir cette merveille. Vous vous arrêterez à Avranches, vous vous promènerez, samedi soir, par exemple, au coucher du soleil dans le Jardin public, d’où l’on domine la baie. Nous nous y rencontrerons par hasard. Papa fera une tête, mais je m’en moque. J’organiserai une partie pour aller tous ensemble avec la famille, le lendemain, à l’abbaye. Montrez de l’enthousiasme, et soyez charmant, comme vous savez l’être quand vous voulez. Faites la conquête de ma tante et invitez-nous tous à dîner à l’auberge où nous descendrons. On y couchera et nous ne nous quitterons ainsi que le lendemain. Vous reviendrez par Saint-Malo, et huit jours plus tard je serai de retour à Paris. Est-ce bien imaginé ? Suis-je gentille ?

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