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Romans de romance dans un seul endroit

Chapitre 3Alliances Dangereuses


Éléonore "Léo" Duval

Léo sentit chaque battement de son cœur comme un coup sourd résonnant à travers son corps. Les pas lourds au-delà de la porte semblaient se rapprocher inexorablement, martelant une cadence obsédante qui faisait vibrer l'air autour d'elle. Elle serra instinctivement les poings, ses ongles s’enfonçant légèrement dans sa paume, tandis qu’elle jetait un regard rapide autour de son appartement. Chaque objet, chaque ombre, devenait une possibilité : une arme improvisée, une cachette.

Elle glissa la clé USB dans la poche intérieure de son chemisier, le geste s’accompagnant d’une sueur froide et d’un frisson indéfinissable. Ces données, précieuses et possiblement mortelles, étaient désormais son dernier filet de sécurité. Ses pensées tourbillonnaient. Fuir par les escaliers de secours ? Trop risqué. Rester et attendre ? Trop passif.

Un coup sec résonna. Elle se raidit. Puis un second, plus insistant. La poignée tourna lentement dans un silence presque surnaturel, chaque mouvement amplifié par sa respiration trop rapide. La porte s’ouvrit soudain dans un fracas qui fit sursauter Léo. Deux hommes en costume sombre pénétrèrent dans l’appartement comme des ombres menaçantes, leur présence dominant immédiatement l’espace exigu.

Derrière eux, une silhouette familière se détacha, imposante et énigmatique : Alejandro Carrera.

Il se tenait là, droit comme une statue de marbre, son regard ombrageux explorant rapidement la pièce avant de s’arrêter sur elle. Pour un instant, une étrange combinaison de soulagement et de colère traversa Léo. Elle serra de nouveau les poings.

« Vous avez un drôle de sens de la visite impromptue, » lança-t-elle, sa voix froide dissimulant habilement son trouble.

Alejandro leva légèrement une main, un geste qui semblait à la fois apaisant et autoritaire. Un simple signal, et ses hommes se retirèrent sans un mot, refermant la porte derrière eux. Le silence qui suivit pesait plus lourd que tout ce qu’elle avait anticipé.

« Vous me remercierez plus tard, » dit-il calmement, sa voix grave trahissant une pointe d’agacement. « Vous avez eu de la chance que ce soit moi et non quelqu’un d’autre. »

Léo croisa les bras, son regard gris brillant d’un défi glacé. « Vous présumez beaucoup si vous pensez que j’étais en danger. »

Alejandro esquissa un sourire, un rictus calculé qui effleura ses lèvres sans atteindre ses yeux. Il s’avança lentement, ses chaussures glissant presque silencieusement sur le parquet, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un mètre entre eux.

« Vous étiez sur le point de devenir une cible, » murmura-t-il. « Ortiz n’était pas seulement un partenaire problématique. Sa mort a laissé un vide, et beaucoup pensent que vous savez plus que ce que vous laissez entendre. »

Léo sentit un frisson monter le long de sa colonne vertébrale, mais elle se força à rester immobile. Elle ne pouvait pas se permettre de céder à la peur. Pas maintenant.

« Et vous êtes venu jouer au chevalier servant ? » lança-t-elle avec une pointe de sarcasme. « Pardon, mais je doute que vous soyez le genre d’homme à agir par pure bonté d’âme. »

Le léger rire qui s’échappa d’Alejandro était presque imperceptible, un souffle d’ironie. « Non. Je suis venu parce que nous avons tous les deux un problème. Croyez-moi, je préférerais être ailleurs. »

Elle haussa un sourcil, jaugeant son interlocuteur. « Expliquez-moi pourquoi je devrais même envisager de vous écouter. »

Alejandro recula légèrement, allant se poster près des grandes fenêtres de l’appartement. La lumière grise de la rue s’insinuait à travers les rideaux, projetant sur lui des ombres mouvantes qui accentuaient les arêtes anguleuses de son visage.

« Ortiz avait des ennemis, et son… départ a ouvert la porte à des conflits internes. Ces gens ne se contenteront pas de s’en prendre au cartel. Ils viendront pour tout ce qui lui est lié. Vous incluse. »

Ces mots résonnèrent comme une mise en garde funèbre. Léo déglutit discrètement, mais son ton resta tranchant. « Et qu’est-ce que cela a à voir avec vous ? Vous cherchez à me recruter ? À me faire taire ? »

Alejandro pivota lentement pour lui faire face, ses yeux noirs étincelant d’une intensité calculatrice. « Vous êtes une personne intelligente, Léo. Vous savez qu’il n’y a pas d’issue simple. Mais vous avez quelque chose que je n’ai pas. Une expertise. »

Le silence s’épaissit, tendu, presque oppressant. Léo calcula, pesant chaque mot, chaque expression. Puis, Alejandro reprit, sa voix plus posée, presque glaciale.

« Je ne suis pas ici pour vous menacer. Je vous propose un marché. Vous m’aidez à stabiliser cette situation. En retour, je m’assure que vous restez en vie assez longtemps pour prouver votre innocence. »

Léo éclata d’un rire amer, presque secoué par l’absurdité de la proposition. « Vous rendez-vous compte de ce que vous demandez ? Travailler pour un cartel ? C’est insensé. »

Alejandro resta impassible, son ton plus calme encore qu’auparavant. « Vous êtes déjà impliquée, que vous le vouliez ou non. Ortiz vous a compromis, et pas seulement juridiquement. Croyez-moi, ce n’est pas une proposition que je fais souvent. Mais vous avez une chance de reprendre le contrôle. Sinon, la police, mes rivaux ou pire encore, le feront à votre place. »

Léo détourna le regard, ses pensées tourbillonnant dans une spirale de dilemmes moraux et de souvenirs fugaces. Elle revit des fragments de sa carrière : les batailles judiciaires, les principes qu’elle avait défendus avec acharnement, les sacrifices qu’elle avait faits pour maintenir une intégrité qu’elle sentait désormais s’effriter.

Accepter cette proposition reviendrait à trahir tout ce qu’elle était. Mais refuser… Refuser signifiait peut-être mourir.

Elle sentit un pincement au creux de l’estomac, un mélange d’appréhension et de colère contenue. Après un long silence, elle releva les yeux, fixant Alejandro avec une détermination froide.

« Très bien. Mais ne vous méprenez pas. Je ne fais pas ça pour vous. »

Alejandro inclina légèrement la tête, une lueur d’approbation fugace dans son regard sombre. « Je n’attendais pas de loyauté, seulement votre compétence. »

Avant qu’elle ne puisse répondre, il se détourna, marchant vers la porte avec une assurance calculée.

« Mes hommes vous attendront en bas. Nous avons beaucoup à faire. »

Léo le regarda disparaître, son cœur battant toujours à un rythme irrégulier. Elle savait qu’elle venait de franchir une ligne, une frontière invisible qu’elle ne pourrait jamais effacer. Mais pour l’instant, elle devait survivre.

Elle attrapa un manteau, glissant un dernier regard dans son appartement désormais silencieux, marqué par une absence oppressante. Puis, d’un pas lent mais décidé, elle sortit, son esprit habité par un tourbillon de certitudes et d’incertitudes. Une chose était claire : le véritable combat ne faisait que commencer.