Chapitre 4 — IV
Sur la route qui va de Nîmes à Arles, en passant par le village de Bellegarde, on trouve, au pied d’une petite colline boisée, une propriété remarquable par l’abondance de ses eaux, la fraîcheur de ses plantations, ce qui est excessivement rare dans un pays que le soleil dessèche et brûle durant quatre mois, tous les ans.
Un parc qui longe la route sur une assez longue étendue, précède la maison d’habitation à laquelle on arrive en marchant dans des quinconces touffus, formés de marronniers et de tilleuls. Les arbres sont très rapprochés les uns des autres. Il en résulte une ombre fraîche et mystérieuse, à l’aide de laquelle on peut, en cet endroit, plus qu’ailleurs, lutter contre les ardeurs dévorantes de l’été méridional.
Au débouché d’une avenue, alors que de l’obscurité relative causée par les arbres on passe dans la pleine lumière, est située au milieu d’une pelouse découverte, la maison d’habitation. On l’a placée hors de l’ombre pour éviter l’humidité du soir et les moustiques, si nombreux dans le pays.
Cette maison n’a rien d’un château, bien que dans la contrée on l’appelle de ce nom. C’est une demeure élégante, à un seul étage, couronné par une terrasse. À l’intérieur, comme à l’extérieur, tout dénote une main pour qui le confortable de la vie a un grand prix.
Cette maison appartenait à M. de Saramie.
C’est là que, durant la belle saison, il habitait avec sa femme. Il n’était qu’à une heure de Nîmes, y pouvait aller tous les jours pour les nécessités de ses fonctions, et vivait de cette vie jusqu’au moment où les vacances du tribunal lui permettaient de partir pour le voyage d’agrément qu’il avait coutume de faire tous les ans avec Juliette.
On était en juillet, dix mois environ après la mort de Salviette.
Il était une heure de l’après-midi. Le soleil versait sur la terre et sur les hommes des torrents de chaleur et de lumière. Les persiennes de la maison demeuraient closes. On n’entendait aucun bruit, si ce n’est le cri monotone, persistant et bruyant des cigales qui buvaient avec délices les rayons incandescents.
Soudain, la porte de la maison s’ouvrit.
Une femme parut sur le seuil. C’était Juliette.
Jamais elle n’avait été plus belle que dans cette lumière éclatante, qui, sous ce ciel bleu foncé, au milieu des champs, servait de cadre à sa beauté et en faisait ressortir tout le charme.
Elle était vêtue d’une robe blanche, sous le fin tissu de laquelle on voyait ses épaules et ses bras nus se dessiner avec leurs lignes pures et suaves, de façon à exercer sur quiconque les voyait un attrait irrésistible.
Ses cheveux, relevés sur son front, ramenés sans apprêt derrière sa tête, tombaient sur sa nuque grasse et brune, retenus dans un filet invisible.
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