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Romans de romance dans un seul endroit

Chapitre 4CHAPITRE IV


Au dîner de MmeLagagne, Lionel avait conscience de n’avoir point perdu son temps. Présenté à Maintoulat par la baronne Kolb, il s’était, du premier coup, mis dans les bonnes grâces de cet homme d’État qui prisait, avant toutes autres choses, les notions générales, la large synthèse, l’application immédiate des découvertes à l’art, à l’industrie, au commerce. Lionel, flattant le futur ministre dans sa manie anticléricale, lui avait signalé les empiètements des missionnaires, leur « déplorable influence » dans nos colonies. Maintoulat n’en était plus à soutenir, comme jadis, que la guerre religieuse n’est pas un article d’exportation. Il méditait une sécularisation générale de la France et de ses possessions d’outre-mer, et M. Schmidt élaborait un rapport en ce sens pour les Chambres. Deux députés nègres, un avocat hindou de Pondichéry, avaient envoyé des documents d’importance majeure. Les renseignements complémentaires apportés par un voyageur aussi distingué que Lionel Gauguet s’ajouteraient utilement à ces matériaux et à ceux aussi que le professeur Schmidt, de Genève, réunissait dans son service de statistique.

Maintoulat avait donné bon espoir au jeune homme : « Mirifisc m’a déjà parlé de vous. J’ai pris bonne note… Bientôt… sans doute… Vous avez ma parole. »

Sans vouloir remarquer que, dans le fumoir d’Émilie, Maintoulat distribuait « sa parole » entre chaque bouffée de son cigare, Lionel était parti, enchanté. Lucie, qui le reconduisit dans son automobile, s’était montrée plus éprise que jamais. Lionel sentait que sa maîtresse s’attachait à lui de plus en plus dans cette union où il devenait lentement le maître. Encore un mois, peut-être, et elle ne lèverait plus le doigt sans sa permission. Elle était sa chose, son bien, ne voyait que par ses yeux. Lucie, en le quittant, avait déclaré son intention de s’installer au Ministère, d’assiéger les Directeurs, le Vice-Recteur, le Conseil supérieur, le Doyen, de ne pas les lâcher avant que son Lionel eût en poche une bonne nomination d’assistant. Elle avait demandé à Lionel quelle était cette histoire ennuyeuse pour lui, à quoi Bonnereau avait fait allusion.

— « Rien… Une erreur pendant ma dernière conférence. J’ai pris un bocal pour un autre… D’ailleurs Bonnereau, qui ne sait rien, n’a pu comprendre… J’ai eu une distraction… »

Mais, méfiante, Lucie insistait : « Des distractions ? Quelque femme peut-être. On dit ces cours du Muséum très mal fréquentés. Des sages-femmes, pire encore, souvent se glissent là… Au reste on pouvait s’attendre à tout. »

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