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Romans de romance dans un seul endroit

Chapitre 3Premiers indices


Louise

La lumière grise de l’après-midi, tamisée par des nuages lourds, baignait l’appartement de Louise d’une douce pénombre. Installée près de la fenêtre, elle feuilletait nerveusement un petit carnet relié de cuir, le médaillon posé à côté d’elle sur un bureau encombré. Les mots de Gabriel résonnaient encore dans son esprit : « codes militaires », « carte cryptée », « rendez-vous secret ». Bien que tout cela paraisse presque trop extravagant pour être vrai, elle ne pouvait ignorer la sensation tenace qui l’habitait lorsqu’elle tenait le médaillon dans ses mains. Il y avait quelque chose de plus vaste, de presque insondable, derrière cet objet.

Louise inspira profondément et ouvrit son carnet. Elle avait soigneusement reproduit les motifs du médaillon, des cercles concentriques aux minuscules gravures mystérieuses. En suivant les contours précis de ses dessins du bout des doigts, elle murmura à mi-voix : « Et si cela menait quelque part ? » Cette pensée la hantait désormais, transformant ce qui n’était qu’une curiosité initiale en une quête presque obsessionnelle.

Elle saisit son téléphone, déterminée à trouver davantage sur Isabelle Chavanne. Cette couturière, évoquée avec une légèreté presque banale dans ses recherches précédentes, devenait une figure centrale dans le puzzle. Après plusieurs minutes infructueuses face à des résultats trop vagues ou génériques, une image attira soudain son attention. Il s’agissait d’une lettre ancienne, jaunie par le temps, partiellement traduite. Les mots qu’elle put lire parlaient d’un « rendez-vous à l’ombre de l’Arc », et la signature discrète en bas du document portait les initiales « I.C. ».

Son cœur s’emballa. Isabelle Chavanne. Cela ne pouvait pas être une coïncidence. Louise agrandit l’image, scrutant chaque détail. L’écriture à l’encre délavée était élégante, presque nerveuse. La lettre évoquait des « secrets dangereux » et un « sacrifice » dont la nature restait mystérieuse. Elle sentit une boule se former dans sa gorge. Ce n’était plus qu’un simple mystère historique ; cela devenait une énigme empreinte d’ombres et de conséquences.

Sa main hésita au-dessus de l’écran de son téléphone. Revoir Gabriel n’était pas une décision qu’elle prenait à la légère. Certes, il avait démontré une expertise certaine, mais il lui était encore étranger, distant, presque hermétique. Pourtant, elle avait besoin d’aide, et il semblait être son meilleur atout. Elle prit une inspiration tremblante et composa son numéro.

— « Allô ? » répondit-il, sa voix grave un peu distraite.

— « Gabriel, c’est Louise. J’ai trouvé quelque chose », dit-elle, sa voix précipitée trahissant son excitation. Elle marqua une pause. « Une lettre, en ligne. Elle mentionne un rendez-vous près de l’Arc de Triomphe, signée par quelqu’un qui pourrait être Isabelle Chavanne. Ça pourrait corroborer vos hypothèses, non ? »

Un silence suivit, interrompu uniquement par ce qui semblait être le bruit de touches que Gabriel tapait en arrière-plan. Quand il parla de nouveau, son ton était plus attentif.

— « Intéressant. Montrez-moi ça. Vous êtes chez vous ? »

— « Oui. »

— « Bien. Je peux passer dans une heure. J’espère que vous avez des captures ou scans de cette lettre. »

Louise acquiesça et raccrocha, un mélange de soulagement et d’appréhension en elle. L’idée de revoir Gabriel lui semblait presque intimidante, mais elle ne pouvait nier que l’expertise de l’historien était précieuse.

Une heure plus tard, un coup résonna à la porte. Gabriel apparut, enveloppé dans un long manteau sombre, ses lunettes embuées par l’humidité de l’extérieur. Il lui adressa un sourire bref mais distant avant d’entrer. Louise, un peu gênée par le désordre de son appartement, lui désigna la table encombrée d’objets, où se trouvaient le médaillon et son carnet de croquis.

— « Voici les dessins et la lettre. Je l’ai enregistrée sur mon téléphone, » expliqua-t-elle en tendant l’appareil.

Gabriel s’assit et examina tout avec soin. Ses doigts se posèrent sur les motifs du carnet, puis il fixa longuement l’écran affichant l’image de la lettre. Son expression, concentrée et analytique, ne trahissait rien de ses pensées.

— « Vous avez raison, » finit-il par dire, brisant le silence. « Cette lettre semble authentique. Le style correspondrait à l’époque, et les initiales… elles appuient fortement l’idée qu’Isabelle Chavanne a réellement joué un rôle dans quelque chose d’important. »

Louise, qui avait retenu son souffle sans s’en rendre compte, expira doucement.

— « Mais, » reprit Gabriel, croisant les bras, « ça ne suffit pas. Ce document seul ne nous donne pas assez pour comprendre. Nous devons chercher plus loin. Les Archives Nationales pourraient contenir des correspondances ou des rapports complémentaires. »

— « Vous pensez qu’on y trouvera quelque chose ? » demanda-t-elle, une pointe de doute dans la voix.

— « Si Isabelle Chavanne a été impliquée dans des affaires politiques ou militaires, il y a fort à parier que des traces existent quelque part. Peut-être même quelque chose en rapport avec ce médaillon. »

Il tendit la main vers l’objet mystérieux, le prenant avec précaution. Sous la lumière tamisée de l’appartement, les gravures argentées scintillèrent faiblement. Gabriel plissa les yeux, remarquant un détail qu’il n’avait pas vu auparavant.

— « Regardez ici, » dit-il, montrant le pourtour du médaillon. « Ces petites encoches. Vous les aviez remarquées ? »

Louise se pencha, suivant son regard. Elle n’avait pas prêté attention à ces minuscules marques, presque imperceptibles.

— « Non, » admit-elle.

— « Je pense que ce médaillon était conçu pour s’emboîter avec quelque chose. Peut-être un socle, ou une autre pièce complémentaire. Cela expliquerait pourquoi il est si difficile à interpréter. Il est incomplet. »

Cette hypothèse fit naître en Louise un mélange d’excitation et d’appréhension. Si le médaillon était incomplet, cela signifiait qu’il restait encore des pièces à trouver, des indices disséminés quelque part.

— « Alors, allons aux Archives, » dit-elle finalement, d’une voix plus ferme qu’elle ne l’avait espéré.

Gabriel esquissa un sourire en coin, un soupçon d’amusement dans son regard. Il hocha la tête, et ensemble, ils commencèrent à discuter des préparatifs pour leur visite aux Archives le lendemain matin. Avant de partir, Gabriel jeta un dernier coup d’œil à l’appartement.

— « Vous avez vraiment un bel espace pour penser, » dit-il doucement, presque sans y réfléchir.

Louise, surprise par cette remarque inattendue, se contenta d’un sourire discret. Une fois la porte refermée derrière lui, elle se laissa tomber sur sa chaise, son esprit vibrant encore de l’intensité de leur échange. Demain apporterait peut-être des réponses. Ou, comme elle commençait à le croire, davantage de questions.