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Romans de romance dans un seul endroit

Chapitre 2Planification de Précision


Margot

La lumière matinale perçait à travers les lourds rideaux de velours du salon du domaine Hensley, projetant des traînées dorées sur le parquet impeccable en chêne. Margot était assise au milieu du chaos soigneusement orchestré, son Planificateur de Précision ouvert sur la table basse en acajou, tel le plan stratégique d’un général en pleine guerre. Une multitude d’onglets colorés dépassaient des bords du carnet, chacun marquant une étape de sa nouvelle campagne de vengeance. Une subtile odeur de cire à la lavande flottait dans l’air, se mêlant à l’arôme du café fraîchement préparé dans la tasse de Sophie, posée un peu trop près du bord de la table.

Margot faisait doucement tapoter son stylo-plume argenté et élégant contre ses lèvres, le poids de l’objet la ramenant à l’instant présent. Chaque lettre inscrite dans son planificateur était inclinée avec une précision parfaite de quarante-cinq degrés, fruit d’années d’entraînement sous l’œil intransigeant de son père. Ce planificateur, cadeau personnalisé de ce dernier, était à la fois un outil et un rappel des attentes de la famille Hensley : maîtrise, élégance et perfection irréprochable. Du pouce, elle traçait les initiales gravées sur la couverture en cuir, avant de chasser l’ombre d’hésitation qui passa sur son visage. Malgré ses efforts pour organiser ses pensées, son esprit tourbillonnait comme une tempête, les éclairs de la trahison de Ryan fracassant son calme apparent.

« Tu es sûre de vouloir aller jusque-là ? » La voix de Sophie rompit le silence, douce mais teintée d’inquiétude. Installée en tailleur dans le fauteuil confortable en face de Margot, elle serrait sa tasse fumante comme un talisman protecteur. Ses cheveux bouclés, noués en un chignon lâche, laissaient s’échapper quelques mèches encadrant son visage. Elle traçait le bord de sa tasse d’un geste distrait, son habituelle vivacité tempérée par la tension ambiante.

Margot ne détourna pas les yeux de son planificateur. « Sophie, ce n’est pas que je veux le faire. J’en ai besoin. »

« Tu en as besoin ? » répéta Sophie avec un scepticisme évident, inclinant légèrement la tête. « On a besoin de respirer, de manger et de dormir. La vengeance, c’est optionnel. »

Le stylo de Margot s’arrêta net. Elle leva enfin les yeux, ses iris bleus perçants croisant intensément ceux de Sophie. « Il ne s’agit pas seulement de vengeance, » déclara-t-elle d’un ton tranchant, aussi précis et maîtrisé que son écriture. « Il s’agit de récupérer ma dignité. Ryan m’a humiliée devant tout le monde. Tu as la moindre idée du nombre de personnes qui m’ont envoyé des textos ‘pensant à toi’ depuis le mariage ? C’est insupportable. »

Sophie haussa un sourcil, un sourire ironique effleurant ses lèvres. « Tu sais, la plupart des gens se contenteraient de bloquer les numéros et de s’enfiler des comédies romantiques douteuses. Pas de fomenter une démolition d’entreprise. »

Un sourire d’une subtilité presque imperceptible joua sur les lèvres de Margot, une étincelle d’humour perçant sa façade irréprochable. « Voilà pourquoi je ne suis pas comme ‘la plupart des gens’. »

« Clairement, » répondit Sophie avec un soupir résigné, s’enfonçant un peu plus dans le fauteuil. « Très bien. Alors, quel est ton plan, Madame Machiavel ? »

Margot redressa ses épaules, retrouvant sa posture royale habituelle. Une lueur de satisfaction éclaira son visage tandis qu’elle tournait un onglet de son planificateur, dévoilant une page remplie de diagrammes méticuleusement dessinés et d’annotations précises. Chaque élément était souligné, codé par couleur, et référencé avec une rigueur quasi-militaire. « Étape une : collecte d’informations. On ne peut frapper que si l’on sait précisément où viser. J’ai déjà commencé à compiler une liste de ses contacts professionnels, de ses réunions prévues et de ses engagements sociaux. Étape deux : perturbation stratégique. Des actions ciblées et discrètes pour déstabiliser sa vie professionnelle, tout en restant hors de soupçon. »

Sophie fronça les sourcils en scrutant la page. « Tu as souligné trois fois ‘diffuser des photos embarrassantes’. Tu comptes exhumer ses photos de promo de fac ? »

Margot esquissa un sourire en coin, un éclat malicieux dans les yeux. « Pas exactement. Mais j’ai quelques… connexions qui pourraient m’aider à dénicher quelque chose de suffisamment compromettant. Ryan a construit sa carrière sur une image de perfection : soigné, charmant, intouchable. Si je parviens à fissurer cette façade, tout s’effondrera. »

« Et quand il découvrira que c’est toi ? » demanda Sophie avec gravité, posant sa tasse sur la table d’appoint d’un geste appuyé. Elle se pencha en avant, joignant les mains. « Parce qu’entre nous, Margot, tu n’es pas exactement connue pour ta discrétion. »

Le regard de Margot se durcit, son menton se relevant. « Il ne le saura pas. J’ai pris soin de rendre chaque étape de ce plan intraçable. »

« Hmm, » murmura Sophie, dubitative. Elle se laissa retomber contre le dossier du fauteuil, sans détacher son regard de Margot, ses doigts tapotant nerveusement l’accoudoir. « Écoute, je comprends. Il t’a blessée. Il mérite probablement un retour de karma. Mais cette vengeance, c’est comme coller un pansement sur une plaie béante. Ça ne guérira pas la douleur. »

La mâchoire de Margot se crispa. Elle referma son planificateur d’un claquement sec et se leva, ajustant soigneusement son chemisier en soie sur mesure. Sous la lumière du matin, le tissu scintillait comme une armure.

« Merci pour ton inquiétude, Sophie, » dit-elle, son ton à la fois distant et reconnaissant. « Mais il s’agit de bien plus que ce qu’il m’a fait. Il s’agit de garantir que personne—ni Ryan, ni ses associés arrogants, ni les vautours avides de ragots—ne doutera plus jamais de ma force. »

Sophie la regarda longuement, son expression s’adoucissant. « Tu sais que tu n’as rien à prouver à personne, Margot ? Surtout pas à un homme incapable de se présenter à son propre mariage. »

Le regard de Margot vacilla un instant. Le planificateur semblait plus lourd dans sa main, ses bords s’enfonçant dans sa paume. « Peut-être pas, » murmura-t-elle doucement. « Mais je dois me le prouver à moi-même. »

Avant que Sophie ne puisse répondre, le téléphone de Margot sonna brusquement, brisant la tension. Elle traversa la pièce pour le saisir sur le buffet en marbre, le cliquetis de ses talons résonnant sur le sol. L’écran affichait un appel d’un numéro inconnu.

« Allô ? » répondit Margot, sa voix regagnant son assurance habituelle.

« Mademoiselle Hensley, » répondit une voix calme et inconnue. « Mon nom est Daniel Greene. »"Je crois comprendre que vous cherchez… certaines informations sur Ryan Caldwell."

Le cœur de Margot manqua un battement, ses doigts se crispant autour du téléphone. Son esprit s'emballa, mais son ton resta maîtrisé. "Je ne sais pas qui vous êtes, ni de quoi vous parlez."

"Bien sûr que non," répliqua Greene avec un petit rire. "Disons simplement que j'ai accès à certains dossiers qui pourraient retenir votre attention. Des photos, des emails, des relevés financiers. Le genre d'informations qui pourraient rendre la vie de M. Caldwell… disons, très inconfortable."

La prise de Margot sur le téléphone se resserra davantage, ses phalanges blanchissant. "Et qu'attendez-vous exactement en échange de tout cela ?"

"Un modeste honoraire pour mes services," répondit Greene avec assurance. "Considérez cela comme une opportunité mutuellement bénéfique. Je vais vous envoyer un échantillon de ce que j’ai en ma possession. Si cela vous intéresse, nous pourrons discuter des modalités."

La ligne coupa avant que Margot ne puisse répondre. Elle fixait le téléphone, son esprit oscillant entre intrigue et méfiance.

"Qui c'était ?" demanda Sophie depuis sa chaise, une prudence palpable dans sa voix.

Margot se tourna lentement vers elle, un léger sourire prédateur étirant ses lèvres. "Une opportunité."

Sophie grogna, s'enfonçant un peu plus dans sa chaise. "Ça ne me plaît pas."

"Ce n'est pas censé te plaire," répondit Margot, ouvrant déjà son agenda pour noter des détails de l'appel. Son écriture cursive glissait sur la page, mais cette fois, ses traits trahissaient une légère hésitation. "Mais je pense que je viens de trouver mon premier coup."

Sophie soupira et attrapa sa tasse. "Promets-moi juste que tu resteras dans la légalité avec cette 'opportunité'. Je n’ai aucune envie de devoir te tirer de prison."

"Aucune promesse," lança Margot, son stylo traçant des lignes avec détermination.

Alors que la lumière du soleil inondait la pièce, illuminant les plans méticuleusement rédigés dans l'agenda, Margot ressentit un frisson qu’elle n’avait pas connu depuis le fiasco du mariage : du pouvoir. Pourtant, sous cette montée de puissance, une question sourde et inexprimée troublait encore son esprit, une question qu’elle n’était pas prête à affronter—quel en serait le prix ?